Contrer l'impunité des forces de l'ordre

 Groupe de réflexion sur l'impunité des Forces de l'ordre


1977. Dans son rapport "Réponses à la violence", le Garde des sceaux Alain Peyrefitte s'inquiétait de la dégradation des relations entre la police et la population. Loin de s'atténuer, cette dégradation n'a cessé de s'accentuer. La défiance et la crainte caractérisent, 43 ans plus tard, le sentiment d'une immense partie de la population française vis-à-vis des Forces de l'ordre.
Restaurer (mieux, instaurer) une saine confiance construite sur un respect mutuel entre la population et "sa" Police-Gendarmerie", voici vers où veut porter le groupe de réflexion qu'Observatoire des Libertés pilote à partir de septembre 2020.
Se défiant d'un manichéisme  nourri d'amalgames, cette réflexion se tiendra au-dessus des raccourcis idéologiques chéris par les médias. Non, la "Police" n'est pas globalement raciste ; non elle ne pratique pas, globalement, une violence illégitime. Oui certains "gardiens de l'ordre" violent la loi. Oui un sentiment d'impunité participe à ces dysfonctionnements. Et, oui, ce sentiment n'est pas injustifié.

La réflexion du groupe se centrera sur la notion d'impunité, telle en en tous cas que la perçoit – pas nécessairement à tort – un nombre conséquent de policiers ou de gendarmes.
La recherche d'un organe de contrôle et d'instruction assez indépendant pour échapper à la confiscation par l' "Institution" (Intérieur, Parquet, Syndicats…) sera centrale. La preuve, la difficulté de déposer plainte, la parade "outrage et rébellion", le lien parquet-auxiliaires de justice, la préférence donnée par le juge à la parole assermentée, l'accès de l'appel à la partie civile, figureront parmi les points à considérer.
Par souci d'efficacité, et sachant impensable une réforme globale, le groupe de réflexion ne pourra qu'effleurer tant d'autres domaines composant la "problématique" Sécurité publique (Citons le recrutement, la formation, l'encadrement, l'armement, les indicateurs de l'action policière, la police de proximité ou son absence, les contrôles à répétition, le manque de moyens etc. Et plus généralement le rôle attendu par le Pouvoir de "ses" Forces de l'ordre).

Pour l'instant - début septembre 2020 -  ont accepté de travailler avec ce groupe de réflexion six parlementaires de quatre partis politiques. Des associations humanistes, des professionnels du droit, des spécialistes des questions de police les assistent.
 
Ci-après, le feuille de route guidant nos travaux
 

Au préalable, rappel des points essentiels du "Préambule" précédemment envoyé aux membres.

- Nous visons à proposer un matériel législatif propre à instaurer un lien de confiance  entre les Forces de l'ordre et les citoyens, confiance construite sur un respect mutuel.

- La spécificité de notre réflexion consistera à s'appuyer sur les analyses existantes – et leur synthèse – pour permettre aux législateurs la rédaction de propositions de loi réduisant l'impunité de fait dont bénéficient les Forces de l'ordre.

- Ainsi la recherche de solutions pratiques nous occupera-t-elle en priorité, appuyée sur un état des lieux amplement réalisé.

- Le travail n'a pas vocation à être rendu publique avant son aboutissement. Toute communication extérieure mentionnant un ou des noms des personnes associées réclamerait leur assentiment.

- La première phase du travail consistera à rassembler les matériaux nécessaires à la rédaction de propositions de loi.

Une seconde phase, plus spécialement en lien avec les équipes des parlementaires, élaborera une stratégie permettant que prospère une ou plusieurs de "nos" propositions de loi.

- La contribution attendue des participants au groupe de réflexion peut schématiquement recevoir deux déclinaisons, selon les points considérés. Soit la synthèse  d'une analyse approfondie. Soit un avis voire une information particulière.

- Sur chacun des points examinés -  sans nécessairement suivre la chronologie de la "gestion" d'un dysfonctionnement - OdL rassemblera l'essence des analyses reçues, voire celles d'entités non-associées à nos travaux. Le document sera envoyé à l'ensemble du groupe à fin de commentaires. Progressivement se dessineront les contours d'une proposition au plus proche d'un consensus.

 

                                      Feuille de route

Rechercher comment s'installe l'impunité, pour ensuite voir comment en diminuer l'impact, relève, dans notre étude commune, des chapitres suivants :

- En amont, la plainte et l'enquête

- En aval, la décision judiciaire ou disciplinaire.

- Les réformes souhaitables – avec au cœur  l'organe d'investigation.

1 / La plainte

- Difficultés liées au dépôt de plainte : Menaces verbales, intimidation, dissuasion via "outrages et rébellion", pusillanimité des avocats etc.

- La preuve : Identification de l'auteur du dysfonctionnement allégué. Rio. Menaces apparues contre le droit de prises de vue par le public. Bons ou mauvais usages de la caméra-piétons, de la vidéo en garde-à-vue. Réception et traitement des témoignages des parties.

 Plus généralement, obstacles à la manifestation de la vérité, et moyens de les lever.

2 / L'enquête

- Déroulement de l'enquête.

- Vices et vertus des organes : DGPN, DGGN, Enquêteurs de la Police et de la Gendarmerie, Défenseur des droits. Fonctionnement, statistiques, forces et faiblesses. Poids des syndicats ; rôle du Ministère de l'Intérieur.  

- Exemples pris à l'Étranger.

3 / La décision (disciplinaire et/ou judiciaire)

- Considérer, la nature des  dysfonctionnements et les  décisions qui y sont majoritairement attachées.

- Éléments constitutifs d'impunité.

Circonstances atténuantes substituées aux circonstances aggravantes dues à la qualité de fonctionnaire d'autorité, préséance donnée à la parole d'un assermenté à celle d'un simple citoyen, instruction traînant des années, légitime défense hissée au rang de statut du Commandeur. Consanguinité, connivence, complaisance… Sinon toujours, du moins trop souvent. Etc.

4 / Perspectives d'une réforme source d'équité.

Voici, pour combattre le sentiment d'impunité des pistes, dont il faudra étudier l'intérêt et la faisabilité.

- Un organe d'enquête réformé : Partiellement ou totalement  indépendant de l'Intérieur et de la Chancellerie ? À pouvoir de sanction au moins conservatoire ? Offrant un rôle à la société civile, au milieu associatif ? Des instances d'enquête étrangères peuvent-elles servir d'exemples ?

- Des décisions éclairées et responsables (ce qui signifie prises dans l'indépendance) :

  . Un rapport public des IGPN et IGGN détaillant annuellement les sanctions.

  . Une saisine du Conseil Supérieur de la Magistrature par le justiciable réellement efficace **

  . La possibilité pour la partie civile d'interjeter appel des dispositions pénales d'un jugement concernant un membre des Forces de l'ordre.

  . La séparation des carrières du parquet et du siège.

  . Le rattachement des poursuites pour dysfonctionnements et celles pour outrage et/ou rébellion qu'elles ont pu susciter.

 D'autres pistes peuvent évidemment s'envisager.


* Par Forces de l'ordre, nous entendrons les services de Police nationale ou municipale, et de Gendarmerie (dévolues à la gestion de foule, à la voie publique, à l'enquête etc.), à l'exclusion -  pour le moment au moins - du personnel pénitentiaire et des services de sécurité privée.

** Depuis 2011 et l'ouverture au justiciable de la saisine du CSM en formation disciplinaire, quelque 2 000 plaintes ont généré… 0 sanction. La quasi impunité (civile, disciplinaire et de facto pénale ) du magistrat a lien avec celle consentie aux Forces de l'ordre.

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